Le pilotage du projet d’établissement, un levier favorisant le leadership pédagogique comme rôle émergent chez les directions de collèges et lycées au Maroc

Denise Bergeron

 Ph. D. e-esef@uiz.ac.ma

         DOI : https://doi.org/10.60481/revue-rise.N2.5

Résumé 

L’article présente et utilise certaines données issues d’une recherche que l’auteur a menée au Maroc concernant le pilotage du projet d’établissement. Les objectifs de cette recherche visaient à décrire la représentation des rôles mobilisés associés à de nouvelles responsabilités des directions de collèges et lycées. Ils s’intéressent aux différences dans les divers établissements d’enseignement ainsi qu’aux perspectives qui émergent de ce contexte de changement. Nous ne présentons ici qu’une partie de l’analyse des résultats de cette étude à savoir le leadership pédagogique comme rôle émergent chez les directions de collèges et lycées. Une recherche qualitative interprétative a été choisie comme méthodologie auprès de 38 participants issus de différents milieux et différentes AREF (Académie régionale d’éducation et formation). Les résultats ont mis en évidence l’émergence importante du leadership pédagogique des directions comme levier lors du pilotage du projet d’établissement.

Mots clés : rôles, direction d’établissement, projet d’établissement, représentation sociale, gestion pédagogique, leadership pédagogique, réforme éducative.

Abstract

The article presents and uses certain data from research that the author conducted in Morocco concerning the management of the establishment project. The objectives of this research were to describe the representation of mobilized roles associated with new management responsibilities. They are interested in the differences in the various educational institutions as well as in the perspectives that emerge from this context of change. We present here only part of the results of this study, namely pedagogical leadership as an emerging role in the management of colleges and high schools. Qualitative interpretative research was chosen as the methodology with 38 participants from different backgrounds and different “AREFs”. The results highlighted the important emergence of the pedagogical leadership of the school management as a lever during the management of the establishment project.

Keywords: roles, school management, school project, social representation, pedagogical management, pedagogical leadership, educational refor

1. Introduction 

C’est dans le cadre de la réforme actuelle amorcée depuis 4 ans au Maroc qu’a été introduit le projet d’établissement comme le pivot central de l’amélioration des apprentissages des élèves dans l’école. Cet outil incontournable est géré par le responsable de l’établissement d’enseignement, la direction. Dans ce contexte de changement, cette dernière a été confrontée à plusieurs enjeux organisationnels qui sont venus grandement modifier ses tâches et ses rôles dans ce qui concerne la gouvernance et la gestion pédagogique de son établissement d’enseignement. La problématique liée à ce contexte de réforme, est issue d’un dysfonctionnement identifié comme majeur dans le Plan d’urgence à savoir une gouvernance hésitante et peu responsabilisante dans les organisations scolaires. Certains constats concernant la situation actuelle des directions de collèges et lycées marocains dans la reconnaissance de leur statut de direction, comme autorité en place et responsable du projet d’établissement (PÉ) y sont présentés. Le pilotage du projet d’établissement relève maintenant de la gestion de la direction d’établissement d’enseignement et cette gestion est nouvelle dans la mesure où un nouveau modèle est introduit et marque une rupture avec un modèle traditionnel. Le projet d’établissement devient un outil stratégique dans l’implantation d’un changement, ce qui entraîne des modifications importantes dans les pratiques professionnelles, notamment dans les représentations des rôles dans ce nouveau cadre opérationnel qui placent les directions des établissements d’enseignement au cœur de l’activité pédagogique. La nouvelle autonomie conférée à la direction par une décentralisation d’un certain nombre de responsabilités et de pouvoirs implique nécessairement des modifications notoires dans le style de gestion à adopter et le développement de nouvelles capacités, habiletés, qualités, compétences lors du pilotage du projet d’établissement. Ce contexte précisant de nouvelles obligations  apporte des transformations  qui amènent les directions à exercer de nouvelles fonctions auxquelles ils ont été insuffisamment préparés. 

Le contexte éducatif marocain dans le cadre des réformes actuelles, présente de nouvelles exigences envers les directions d’établissement d’enseignement dans le cadre du pilotage du projet d’établissement et la situation actuelle de ces directions les situent  dans une nouvelle dynamique managériale et pédagogique, ce qui nous amène à nous poser des questions importantes qui ont orienté cette recherche. 

En tenant compte de la problématique d’implantation de la nouvelle réforme, des changements importants ont été apportés au système éducatif marocain ayant des répercussions jusque dans l’établissement d’enseignement.  Nous notons principalement une nouvelle imputabilité attribuée aux directions des établissements d’enseignement quant à l’amélioration des apprentissages des élèves.

Les questions précédentes ont orienté le but général de la recherche entreprise au Maroc afin de mieux comprendre la représentation des rôles joués, exercés, mobilisés par les directions de collèges et lycées  lors du pilotage du projet d’établissement.

La question générale de recherche qui en découle est la suivante : 

Comment, dans le cadre des nouvelles politiques éducatives au Maroc, les directions de collèges et de lycées se représentent-elles leurs rôles mobilisés issues de nouvelles tâches complexes lors du pilotage du projet d’établissement ? 

La question principale de la recherche a orienté celle-ci vers trois objectifs :

1. Décrire les représentations des rôles mobilisés chez les directions de collèges et de lycées marocains issus des activités menées dans le cadre d’une mobilisation lors du pilotage du projet d’établissement.

2. Analyser les écarts, s’il y a lieu, entre les différentes représentations des rôles afin de dégager des propositions nouvelles concernant l’exercice des rôles chez les directions d’établissements d’enseignement marocains dans le cadre de la gestion du projet d’établissement

3. Porter un regard prospectif en ce qui concerne l’exercice et la mobilisation   des rôles chez les directions d’établissements d’enseignement marocains dans le cadre de la gestion du projet d’établissement qui est un aspect nouveau de la gestion d’un établissement d’enseignement au Maroc.

Le cadre conceptuel utilisé dans la recherche est multi référencé et s’appuie sur des travaux de recherche  qui se sont intéressés au concept de rôle chez le directeur d’établissement selon sa représentation et selon le contexte dans lequel la direction exerce, joue, mobilise les dits rôles. La théorie de Katz et Kahn (1966, 1978) a été choisie comme base essentielle. Ce cadre théorique est complété par l’approche actionniste de Silverman (1974) et l’approche stratégique proposée par Crozier et Friedberg (1992). La perspective conceptuelle de modèles décrits par des auteurs tels que Mintzberg (1984) et Brassard et Brunet (1986), vient compléter les approches théoriques précédentes et constitue l’axe majeur conceptuel autour duquel gravite les autres concepts. Afin de préciser la démarche de la recherche, les concepts de représentation, de représentation sociale, de perception, de projet d’établissement viennent compléter le cadre conceptuel.

La méthodologie utilisée pour répondre à la question de recherche est de nature interprétative. Ce choix se justifie par le fait que le modèle du projet d’établissement (PÉ) et sa gestion sont nouveaux dans le système éducatif marocain. Lors de nos rencontres avec les directions, sous forme d’entretiens semi-dirigés, nous avons utilisé un questionnaire validé à plusieurs égards qui nous a servi de guide et nous a permis d’obtenir des informations pertinentes concernant le sujet de notre recherche. Certains choix ont été faits, concernant l’échantillon (participants) et les critères qui y sont liés, afin d’apporter plus de clarté à tout le processus et pour une meilleure compréhension des rôles mobilisés lors du pilotage du projet d’établissement. Les diverses composantes méthodologiques de la recherche, à savoir le type et la stratégie de recherche, les sources de données ainsi que les éléments relatifs à la collecte des données, au traitement et à l’analyse de celles-ci, y seront brièvement décrites, de même que l’opérationnalisation et l’instrumentation de la méthodologie retenue.

 Les résultats obtenus à la suite de l’analyse des données recueillies font état des différentes étapes concernant le pilotage du projet d’établissement tout en portant un regard sur les différentes tâches exigées de la part des directions d’établissement dans tout ce processus. Ils font ressortir tous les aspects spécifiques relevant de leur gestion du projet d’établissement. Dans ce contexte opérationnel, nous avons présenté les différentes représentations des rôles mobilisés par les directions de collèges et lycées et nous avons décrit les différences notoires qui émergent de l’exercice de ces rôles. C’est cette deuxième partie des résultats qui fait l’objet de cet article et dont nous en présenterons l’analyse.

Nous montrons comment le projet d’établissement est à la fois un levier et un vecteur de la représentation des rôles chez les directions d’établissement. Nous faisons  ressortir les aspects des rôles mobilisés qui ont émergé dans ce nouveau contexte, selon la représentation qu’en ont fait les directions rencontrées. Nous précisons  certaines conditions favorisant une gestion du projet d’établissement plus cohérente tout en maximisant les rôles mobilisés chez les directions d’établissement d’enseignement.

En conclusion générale, nous dégageons un certain nombre de constats de cette recherche et nous proposerons des recommandations concernant le processus d’amélioration des apprentissages des élèves et de leur réussite au cœur des collèges et lycées marocains. Dans ce cadre défini, nous ciblerons  tout l’aspect de l’émergence du  leadership pédagogique comme levier central lors du pilotage du projet d’établissement.

2. Méthodologie de recherche 

2.1 Le type de recherche

S’inscrivant dans le paradigme interprétatif, une méthodologie qualitative a été choisie dans le cadre de cette recherche afin d’analyser les représentations des rôles mobilisés chez les directions de collèges et lycées marocains lors du pilotage du projet d’établissement. Selon Strauss et Corbin (2004), la recherche qualitative est :

Tout type de recherche qui amène des résultats produits ni par des procédures statistiques ni par d’autres moyens de quantification. Il peut s’agir de recherches concernant la vie d’individus, des expériences vécues, des comportements, des émotions et des sentiments tout comme le fonctionnement des organisations. La partie la plus importante de l’analyse est une interprétation (Strauss et Corbin, 2004, p. 28).

Le choix méthodologique de la recherche qualitative répond à cette visée, car elle traite les données difficilement quantifiables, elle recourt à une méthode d’analyse souple et davantage inductive (recherche exploratoire) et finalement, elle se concentre sur le sens que les personnes donnent à l’action. (Deslauriers, 1993). C’est aussi dans cette perspective qu’Anadón (2006) cible le point de vue des acteurs, le sens qu’ils accordent à leurs actions, dans une situation interactive qui vient influencer leur perception.

En somme, l’étude de la représentation des rôles mobilisés chez les directions de collèges et lycées marocains dans le cadre du pilotage du projet d’établissement nécessite, selon la conception de divers auteurs notamment Deslauriers et Kérisit (1997), Van Der Maren (1995) ou Trudel (2001), d’opter pour une approche méthodologique qui tient compte du contexte dans lequel se déroulent les différentes activités et du sens que chacun lui donne et de l’expérience qui la construit.

2.2    Choix méthodologique 

À notre connaissance, aucune recherche n’a été faite sur le sujet dans les pays africains ou maghrébins, et pourtant, l’intérêt est de plus en plus grand dans les pays développés, comme dans les pays dits en développement, pour l’autonomisation des établissements d’enseignement, mais aussi pour une bonne gouvernance favorisant la qualité de l’éducation et la réussite des élèves. Comme la direction d’établissement d’enseignement est au centre des changements de la réforme au Maroc, par les rôles importants qu’elle exerce dans tout le processus de mise en œuvre du projet d’établissement (PÉ), il apparaît essentiel de bien circonscrire tous les aspects de la représentation des rôles mobilisés par celle-ci dans ce contexte.

Dans les textes des politiques éducatives marocaines, on constate que le concept de rôle est peu présent et qu’il est souvent confondu avec la tâche ou la fonction organisationnelle occupée par les directions d’établissements d’enseignement. Comme le concept de rôle est multidimensionnel, qu’il revêt un caractère complexe, surtout dans le cadre d’un pays en développement où des personnes devront exercer de nouveaux rôles, le choix d’une méthodologie qualitative descriptive de type interprétatif, permettant une collecte de données centrée sur l’individu et favorisant la construction de connaissances par la description et l’interprétation qu’en feront les différents participants lors des entretiens semi-dirigés nous apparaît pertinent.

La méthodologie  qualitative, descriptive a utilisé  principalement des entretiens semi-dirigés qui ont permis   l’émergence de données susceptibles de rejoindre les objectifs fixés afin de se « rapprocher au plus du monde intérieur, des représentations et de l’intentionnalité des acteurs humains engagés dans des échanges symboliques » (Van der Maren, 2004, p. 103). Ce qui est recherché appartient au vécu quotidien des individus et est constitué essentiellement d’interactions entre eux et leur environnement.

Ce type de recherche, comme mentionné précédemment, vise à comprendre les visions de la réalité des personnes et la façon dont elles se comportent et agissent. Cette perspective oblige les chercheurs à comprendre les phénomènes à partir de discours, d’actions et de documents ; elle les amène à s’interroger sur la façon dont les individus interprètent et donnent un sens à leurs paroles et à leurs actes, ainsi qu’à d’autres aspects du monde avec lesquels ils sont en relation (y compris les autres personnes). Les chercheurs choisissent, dans la mesure du possible, les participants en fonction de leur contribution potentielle au développement et à l’avancement des connaissances dans le domaine étudié. C’est cette orientation que nous avons choisie dans le cadre de cette recherche.

La démarche revêt un caractère descriptif visant à rendre compte du caractère complexe du phénomène étudié et d’en faire une description approfondie qui tient compte de la dynamique propre à la population ciblée (Duhamel et Fortin, 1996 ; Mucchielli, 2004).

La recherche qualitative a développé des indicateurs pour juger de sa validité et de sa fidélité. La validité signifie que la méthode de recherche utilisée a été capable de répondre à la question posée, alors que la fidélité désigne la capacité de reproduire la recherche en obtenant les mêmes résultats. (Deslauriers, 1991 ; Lapierre, 1997). Lincoln et Guba (1985), proposent les quatre indicateurs suivants qui nous serviront à juger de la validité et de la fidélité de nos données. Ce sont : 

1) La crédibilité : le chercheur démontre les résultats obtenus, et s’ils sont crédibles aux yeux des personnes ayant participé aux travaux de recherche. La crédibilité est assurée par les activités menées sur le terrain. 

2) La transférabilité : le chercheur doit spécifier le contexte à partir duquel les concepts pourraient s’appliquer. La recherche qualitative prétend qu’il est impossible de généraliser à partir d’un échantillon, mais il faut plutôt penser en termes de transférabilité d’un contexte à un autre.

3) La fiabilité : on atteint cet objectif en demandant à un autre chercheur (les membres du comité de thèse) de faire une sorte d’expertise de la recherche semblable à ce que fait un expert dans le cadre d’un bilan. II n’invente rien il regarde ce qui est vérifié, et s’assure que les procédures en usage ont été bien suivies.

4) La validation : en corollaire au critère précédent, l’expert passe les données en revue, mais, en plus de contrôler si les procédures ont été suivies, il les vérifie et atteste que les résultats obtenus concordent avec les données recueillies (Deslauriers, 1991).

En bref, la méthodologie qualitative descriptive de type interprétatif vise à saisir le sens que les individus donnent à leurs expériences en fournissant une description détaillée des phénomènes vécus. Elle implique d’utiliser notamment des entretiens semi-dirigés qui permettent l’émergence de données se rapprochant des représentations transmises par les acteurs choisis dans le cadre des rôles exercés et mobilisés lors du pilotage du projet d’établissement. Elle correspond à des indicateurs permettant de juger de sa fiabilité et de sa validité. 

2.3    Les participants 

Les participants à notre recherche proviennent de deux catégories de directions d’établissement d’enseignement au Maroc : les directions de collèges et les directions de lycées. Elles sont issues de trois académies régionales de l’éducation et de la formation (AREF), où l’on retrouve des établissements d’enseignement, autant en milieu rural, semi-urbain qu’urbain. Les deux catégories de directions comptaient des femmes et des hommes, mais ces derniers étaient majoritaires dans le contexte du système éducatif marocain au moment de la collecte de données. Le recrutement des directions d’établissements d’enseignement marocains a été fait en collaboration avec le ministère de l’Éducation nationale au Maroc, sa direction responsable du projet d’établissement (direction de la vie scolaire), les différents directeurs d’académies régionales de l’éducation (AREFs), ainsi que les directions provinciales responsables des établissements dans leur circonscription.

Les AREFs ont été choisies de façon aléatoire en fonction du nombre d’établissements, collèges, lycées, où on avait mis en œuvre le projet d’établissement.

Nous désirions une répartition la plus égale de directions dans le milieu rural, semi-urbain et urbain, ainsi que de femmes et d’hommes représentés dans l’échantillon de recherche. Les directions ont été sélectionnées dans les différentes AREFs en fonction des critères  suivants : le nombre d’années à la direction d’un collège ou d’un lycée (ce nombre pouvait varier, mais un minimum de cinq ans était requis, soit dans le même établissement ou dans un ou d’autres établissements d’enseignement), une base de formation sur le projet d’établissement lors de leur participation aux communautés d’apprentissage et la mise en œuvre du projet d’établissement depuis au moins deux ans. La recherche appartenant au paradigme interprétatif tend à privilégier un échantillonnage de type intentionnel, non probabiliste c’est-à-dire que les personnes sont choisies en fonction de leur expertise, de leur pertinence par rapport à l’objet d’étude et parce qu’elles sont capables et intéressées à verbaliser sur le sujet (Savoie Zajc, 2004). Dans la présente recherche, les personnes sélectionnées répondent aux critères mentionnés précédemment et elles  étaient au nombre de trente –huit(38). 

2.4    La collecte de données 

La démarche méthodologique menant à la collecte de données a été effectuée en trois sections. La première concerne principalement l’élaboration du guide d’entretien semi-dirigé individuel et sa validation ; la deuxième porte sur les modalités de collecte de données des entretiens ; et la troisième concerne le traitement des données à l’aide du logiciel  NVIVO.11.

2.4.1    L’élaboration de l’instrument de collecte de données

Afin de répondre adéquatement aux objectifs de notre recherche, l’instrument de collecte de données choisi est un canevas d’entretien comprenant quatre volets en lien avec les rôles mobilisés chez les directions d’établissements d’enseignement dans le cadre du pilotage du projet d’établissement :

  1. Les tâches et les activités annuelles reliées au processus de réalisation du projet d’établissement selon la méthode É.P.A.R. ;
  2. La représentation des rôles interpersonnels, des rôles informationnels et des rôles décisionnels ainsi que des rôles mobilisés dans le cadre du pilotage du projet d’établissement (PÉ)
  3. Les nouvelles activités de gestion liées au projet d’établissement, certains aspects prospectifs, notamment le rôle de leader pédagogique ;
  4. La formation continue visant à appuyer les directions dans le processus d’amélioration du projet d’établissement.

Le but des entretiens était de saisir le point de vue de chaque participant, concernant les tâches et les rôles mobilisés dans le cadre du pilotage du projet d’établissement. Étant donné la complexité de certains thèmes, il nous a fallu une méthode de collecte de données assurant une certaine souplesse, sans perdre la rigueur scientifique, dans le but de favoriser une interaction entre la chercheuse et les participants. e. s afin d’éclaircir certains points. Nous avons fait le choix de l’entrevue semi-dirigée qui favorise une interaction verbale souple qui permet une compréhension riche du phénomène étudié dans un cadre de construction conjointe avec l’interviewé. L’entretien de recherche qualitatif a été privilégié en raison de la question de recherche puisque cette technique permet de recueillir des données liées aux attitudes, aux perceptions, aux représentations ou à l’expérience (Boutin, 2008, 2000).

Nous avons élaboré un canevas d’entrevue et l’avons soumis à la critique d’experts, dont des professeurs en administration scolaire. Il a aussi été soumis à des responsables marocains du ministère de l’Éducation nationale. Cette pratique a permis d’améliorer le canevas et d’assurer ainsi la pertinence ou la validité des données recueillies. Les questions posées aux participant. e. s sont ouvertes et neutres pour ne pas suggérer les réponses (Savoie-Zajc, 2000). Le but étant de faire en sorte qu’elles ou ils ne se sentent pas obligé. e. s de répondre dans un sens ou un autre, ou encore qu’il faille leur fournir des explications qui auraient certainement conditionné leurs    réponses.

2.4.2    La réalisation des entretiens semi-dirigés individuels

Le canevas validé par les experts a servi lors des entretiens semi-dirigés. Les entretiens se sont déroulés au Maroc dans les espaces mis à notre disposition par le MEN au niveau des directions régionales. Durant plus de trois semaines, nous avons rencontré les directions de collèges et de lycées marocains, dans diverses régions du territoire des trois AREF retenues. Les entretiens, d’environ 60 minutes, se subdivisaient en trois parties : l’ouverture, l’entrevue proprement dite, et la clôture, selon le modèle recommandé par Savoie-Zajc (2000).

Après avoir rappelé le principe de l’anonymat, avoir obtenu le consentement de la personne interviewée, lui avoir fait part des aspects éthiques de la recherche, la chercheuse présentait globalement les sujets qui seront abordés lors de l’entretien et offrait la possibilité à chaque participant d’intervenir afin de préciser sa pensée. L’entrevue se terminait par un retour sur les sujets abordés et une invitation à ajouter des compléments d’information si le répondant le jugeait nécessaire. II s’agissait de clore l’entretien en se préoccupant de l’interviewé et de son état après avoir livré des expériences personnelles (Savoie-Zajc, 2000) ou avoir transmis des données de nature délicate. Les entretiens individuels menés dans le cadre de notre recherche peuvent être qualifiés de semi-dirigés : quelques questions de départ suscitaient les réflexions et les commentaires de chaque personne, des précisions pouvant être demandées par la suite. Nos interventions visaient surtout à nous assurer d’une bonne compréhension du propos du participant, en répétant ou en reformulant certaines phrases, ou encore en demandant des explications supplémentaires. Cependant, nous avons choisi de considérer cette recherche comme un processus interactif lors des entretiens semi-dirigés, aussi ne voulions-nous pas nous confiner dans l’attitude du chercheur qui tire de l’information de ses sujets, mais ne leur apporte rien en retour par souci de « neutralité ». C’est pourquoi, lorsqu’un participant nous interrogeait sur une situation précise que nous connaissions ou sur un concept à nuancer, nous lui répondions de la manière la plus nuancée possible en gardant une attitude ouverte et neutre, sans chercher à influencer sa réponse. Nous avions aussi mis à la disposition des participants un glossaire permettant de clarifier certains concepts abordés lors des entretiens semi-dirigés.

Avec l’accord des participants, les entretiens ont été enregistrés de manière à éviter la prise de notes et à accorder plus d’attention aux réponses. La confidentialité et l’anonymat étaient requis pour  chaque personne rencontrée.

2.4.3    Les modalités de traitement et d’analyse des données

La recherche a pour objectif de comprendre et d’analyser, dans les propos des directions de collèges et lycées marocains la représentation de leurs rôles mobilisés lors du pilotage du projet d’établissement. « La tâche de l’analyste consiste, dans ce mélange d’informations, à dégager la façon dont la personne vit son rapport au monde, l’interprétation qu’elle donne à son expérience (Morin, 1996, p. 19) » L’analyse vise à découvrir la logique sous-jacente à la pratique de la personne, à comprendre la structure des influences et à en tirer une interprétation cohérente.

Ainsi, pour l’analyse des propos tenus en entretien par les répondants, l’analyse thématique a été privilégiée, car « cette analyse est qualifiée de polyvalente, pouvant s’exercer de manière inductive, en partant du corpus pour générer des thèmes, ou encore, de manière déductive en ayant, préalablement à l’analyse, identifié les thèmes à repérer » (Deschenaux et Bourdon, 2005, p. 6).

L’analyse thématique du contenu est l’une des techniques qui s’intéresse justement au contenu manifeste. Nous l’avons choisie parce qu’elle présuppose que les énoncés d’un discours sont des unités complètes en elles-mêmes et sur lesquelles peuvent être portées des opérations. Effectivement, à travers la conception que nous avons de nos interlocuteurs, nous considérons que leur discours exprime clairement leur perception et leur représentation au sujet des thèmes discutés. Ainsi conçu, le contenu du message fait l’objet d’un certain nombre d’opérations qui peuvent avoir pour but, comme le souligne Van der Maren (1995), de condenser, de résumer, d’éclairer, de systématiser le contenu de la pensée d’un ou de plusieurs informateurs ou encore d’examiner l’évolution et l’importance relative de différentes énonciations réparties dans le temps et dans l’espace. L’analyse thématique nous permet donc d’identifier le contenu du texte par le repérage, le comptage et la comparaison des thèmes, des idées directrices et des termes pivots.

Ainsi, au regard de l’approche privilégiée dans cette recherche, l’analyse des données a été effectuée en trois étapes. Premièrement, un travail de transcription a été réalisé après les entretiens dont les propos ont été enregistrés. Cette phase consiste à mettre sous forme écrite ce qui a été partagé par les participants, les verbatim. Cela permet selon Paillé et Mucchielli (2003) « d’être relativement à l’écoute de catégories autres que celles qui nous sont propres » (p. 30). Ainsi, une première analyse sommaire a été effectuée afin de rechercher le sens derrière les représentations des rôles exercés et mobilisés par les directions rencontrées. 

La seconde partie du travail transposition de la première, c’est-à-dire que les différentes transcriptions sont annotées, catégorisées et commentées. Celle-ci a été réalisée à l’aide du logiciel de traitement de données qualitatives NVIVO 11 et consiste en une réduction des « informations en petites unités comparables, en noyaux de sens pouvant être rassemblés » (Deslauriers, 1991, p. 82). Autrement dit, « il s’agit de la “décontextualisation” impliquant que des parties d’entretiens ou des épisodes d’observation soient physiquement détachées de leur tout originel et regroupés par thèmes » (Wanlin, 2007, p. 8). Cette phase consiste à sortir de son contexte un extrait du texte afin de le rendre sémantiquement indépendant, dans le but de créer des catégories ou des thèmes regroupant tous les extraits traitant d’un sujet en particulier. Le « sujet » regroupant les extraits reliés à ce thème s’appelle un code dans le langage de l’analyse qualitative » (Deschenaux et Bourdon, 2005, p. 7). Comme le mentionnent Paillé et Mucchielli (2003, p. 31), les catégories de la transposition réfèrent « à la sensibilité théorique du chercheur, à ses connaissances et à l’orientation théorique de son projet de recherche ». Concrètement, « à chaque fois qu’un des thèmes est repéré, l’analyse place l’ensemble des extraits rattachés à ce thème à un même endroit […] l’extrait est sorti de son contexte » (Deschenaux et Bourdon, 2005, p.7).

L’analyse de contenu consiste à appliquer, au corpus de données, des traitements autorisant l’accès à une signification différente répondant à la problématique, mais en ne dénaturant pas le contenu initial (Bouillaguet, 1997). Cette deuxième opération consiste surtout à procéder aux étapes de codage, décompte ou énumération en fonction des consignes préalablement formulées. Elle comporte deux procédés clés :

Pour atteindre les objectifs et répondre à la question de recherche, les caractéristiques des propos de chacune des personnes interrogées ont été distinguées, et ce, d’après diverses variables. Ainsi, un traitement vertical de chaque entrevue a été effectué, soit de mettre à jour la logique interne du discours. Ce traitement vertical des données a par la suite permis, d’effectuer des regroupements horizontaux entre les entrevues, c’est-à-dire, d’effectuer des comparaisons afin de cibler les caractéristiques propres à la problématique et procéder à la dernière étape de traitement des données (la reconstitution). « En effet, chaque structure, chaque document aux structures différentes est ainsi “défait” ou déstructuré pour construire une nouvelle structure qui les intègre. C’est la dernière étape de l’analyse qui témoigne de cette reconstruction… » (Deschenaux et Bourdon, 2005, p. 8).

Nous avons utilisé une grille de codage comprenant des rubriques, des catégories et codes. Les rubriques reprennent les éléments du cadre conceptuel : représentation sociale, rôles mobilisés, projet d’établissement. Chaque rubrique se décline en catégories qui précisent le sujet abordé et pour lesquelles le texte devrait fournir des informations. Dès lors, tous les passages du texte qui comportent une information correspondant à une de ces rubriques seront considérés comme significatifs et retenus comme unités à analyser .Puis, ce sont les codes qui précisent les différentes facettes du thème. Lorsque le code n’était pas suffisamment explicite, nous avons ajouté une courte définition. Finalement, un exemple tiré du verbatim complète le tout. Notons que la grille de départ a évolué au fil des analyses pour tenir compte des propos plus personnels tels des récits d’évènements, des propositions d’amélioration, des exemples illustrant les représentations des rôles mobilisés.

L’élément codé est toujours une unité de sens. Pour qu’un codage soit efficace, on s’attend à ce qu’il soit assez discriminant, c’est-à-dire qu’un même extrait ne puisse pas être codé dans plusieurs rubriques concurrentes, malgré parfois certaines interfaces. La rigueur exige aussi que le codage soit réalisé d’une manière constante ou standardisée (fidèle) (Van der Maren, 2004). Il faut s’assurer que les mêmes codes soient associés de manière systématique aux mêmes « unités de sens ». Après la transcription des entretiens, nous avons procédé à plusieurs relectures des verbatim associés aux catégories établies afin de peaufiner le codage et de préciser des sous-catégories qui venaient nuancer certaines rubriques.

La dernière étape d’analyse des données se résume en un travail de reconstitution qui prend la forme « d’un récit argumenté autour des principales catégories d’analyse, avenues de compréhension, pistes d’interprétation » (Paillé et Mucchielli, 2003, p. 30). Cette étape a conduit à effectuer une interprétation et comprendre les divers éléments et caractéristiques propres à l’objet de recherche, principalement la représentation des rôles mobilisés par les directions de collèges et lycées marocains dans le contexte du pilotage du projet d’établissement. Les entretiens réalisés ont permis de mettre en lumière la réalité vécue par les directions rencontrées tout en cernant les tâches nouvelles issues du pilotage du projet d’établissement dans lesquelles se sont exercés les différents rôles mobilisés. Des catégories d’abord proches du discours recueilli, puis plus formelles, c’est-à-dire liées au cadre conceptuel, ont été construites ; et enfin, à la lumière du procédé de traitement des données, on peut déjà affirmer comme Trudel (2001) « que l’analyse des entretiens choisie s’inscrit dans une approche phénoménologique centrée sur le vécu, l’expérience, la perception des acteurs, la subjectivité. Selon cette perspective, le témoignage des acteurs quant à leur expérience singulière, unique et particulière porte en lui-même la vérité de ses propos » (Trudel, 2001, p. 96). 

Afin d’assurer la validité de l’analyse des données, au-delà d’un contrôle de la saturation des données (Deslauriers, 1991 ; Savoie-Zajc, 2004), deux techniques ont été utilisées. D’une part, un contrôle sur le matériel résidu a été effectué. Plus spécifiquement, « il s’agit de s’assurer que les interprétations formulées demeurent pertinentes même au regard d’une partie du corpus qui n’a pas été retenue lors du codage initial » (Mukamurera, Lacourse et Couturier, 2006, p. 127). D’autre part, une recherche de preuves contraires a également été privilégiée, « cette tactique consiste pour l’essentiel à se demander s’il existe des données ou connaissances qui contredisent une conclusion ou qui sont incompatibles avec elle » (Mukamurera, Lacourse et Couturier, 2006, p. 127), notamment à l’intérieur du corpus.

2.5 Les limites de la recherche

Toute recherche et toute méthodologie choisie comportent un certain nombre de limites. Dans notre recherche, nous avons formulé nos questions dans une optique d’une compréhension approfondie des concepts en jeu et d’une précision de ces derniers. Cependant il se peut que dans un contexte où la langue officielle du pays est l’arabe et où le français est une langue seconde parlée, qu’il y ait quelques biais, malgré l’utilisation d’un traducteur connaissant les concepts clés de la recherche. C’est pourquoi nous nous sommes assurés de questionner à nouveau en utilisant des questions indirectes s’il était nécessaire pour apporter plus de précisions.

Il peut exister d’autres limites observées lors des entretiens, notons : 

1) la qualité de l’échange entre la chercheuse et le participant qui revêt un caractère important dans le  processus de l’entretien. La richesse de l’information découle, en quelque sorte, de la capacité de l’intervieweuse à manifester de l’intérêt et de la sympathie par rapport au sujet abordé, et à établir un bon contact avec le répondant ; 

2) le langage utilisé demeure un puissant filtre et constitue une autre limite à prendre en considération (Savoie-Zajc, 2000). Afin de réduire les impacts négatifs lors d’entretiens, l’intervieweuse a porté une attention particulière à la reformulation, à l’énoncé de bilans et à la validation par le répondant de ses propos (Van der Maren, 1995). 

En terminant, Van der Maren (1996, p. 412), mentionne que deux biais guettent les analyses interprétatives des données. « D’abord la projection par laquelle l’analyste choisit la théorie interprétative en fonction de sa propre expérience, tenant celle-ci comme un garant de la validité et de la généralité de la théorie ». Autrement dit, les analyses interprétatives se voient souvent reprocher le subjectivisme de l’analyste et les interprétations globalisantes par lesquelles elles parviennent à tout expliquer en recourant à des arguments ad hoc post hoc. Dans cette recherche l’analyse interprétative a voulu répondre à des objectifs les plus neutres possibles, compte tenu du contexte, de la réalité des directions de collèges et lycées marocains qui sont très éloignés de celle du chercheur. L’analyse de données s’est effectuée de la manière la plus objective en assurant un traitement unique à l’échantillon représentatif que nous avions et qui présentait une population de directions d’établissement d’enseignement différentes de celles de nos systèmes éducatifs en Amérique.

3. Analyse des Résultats

La réforme éducative engagée au Maroc a placé le projet d’établissement au cœur même de l’école, et la direction du collège ou du lycée comme pilote d’un changement majeur concernant la dimension pédagogique. Dans ce contexte de renouveau, le projet d’établissement a requis, de la part de la direction et des participants, une nouvelle adaptation en favorisant notamment l’émergence de nouvelles pratiques pédagogiques et en situant la pédagogie au centre des rôles exercés par les directions. La direction est devenue le pivot central du pilotage de celui-ci, ce qui a requis de sa part de modifier sa posture traditionnelle de direction et d’adopter une nouvelle posture au regard des nouveaux rôles. Cependant, toutes les directions rencontrées n’ont pas encore développé également les nouveaux rôles émergents que nous présentons, car cette posture est relativement nouvelle et son encadrement n’est pas encore bien défini. Ce sont surtout certaines directions de lycées qui ont fait état des activités innovatrices qu’elles ont mises en place afin d’exercer les rôles importants en lien avec une gestion pédagogique du projet d’établissement et exceptionnellement, quelques directions de collèges qui ont développé ces nouveaux rôles.

Les représentations individuelles des rôles mobilisés  chez des directions de collèges et lycées dépendent de la façon dont chaque individu perçoit cette nouvelle réalité, le contexte pédagogique et cet aspect oriente l’action sur le rôle tout en donnant un sens aux conduites, aux comportements des acteurs que ce sont les directions. Les stratégies développées par certaines directions favorisent le changement de pratiques de gestion et orientent les actions vers de nouvelles pratiques pédagogiques, car chaque établissement proposait les orientations à suivre selon un consensus au sein de leur   personnel. C’est dans ce cadre de changement que l’on peut noter certains rôles émergents chez des directions marocaines comme agent de changement, accompagnateur pédagogique, leader pédagogique et superviseur pédagogique.

Le rôle d’accompagnateur pédagogique est relativement nouveau pour les directions de collèges et de lycées marocains, et pour certains, il n’est pas complètement assumé, demandant encore des formations continues adéquates pour un développement professionnel complémentaire. Cependant, toutes les directions rencontrées ont démontré un engagement ferme envers l’amélioration des apprentissages des élèves au regard de leur implication pédagogique dans le projet d’établissement. C’est dans cette optique que nous présentons surtout le rôle de leader pédagogique qui se situe au centre de la gestion pédagogique du projet d’établissement.

Afin d’exercer un leadership ayant de l’influence, les directions rencontrées se voient jouer à la fois un rôle de soutien, un rôle d’accompagnateur, un rôle de rassembleur auprès d’une équipe faisant consensus autour d’idées partagées sur les décisions à prendre pédagogiquement. Tout en étant à l’écoute du milieu, des innovations pédagogiques permettant ainsi d’améliorer les stratégies pédagogiques pour une meilleure réussite des élèves, les directions rencontrées se sont engagées dans des tâches complexes et des rôles nouveaux pour elle.  Le rôle de leader pédagogique fait partie de ceux-là et  peut prendre plusieurs dimensions, car il est souvent polysémique. Le leadership pédagogique comprend chez les directions, une vision large du leadership qui englobe l’apprentissage notamment. Le cadre actuel où les directions ont à gérer le projet d’établissement est orienté vers l’amélioration des apprentissages des élèves au regard de l’amélioration des pratiques pédagogiques et des compétences des enseignants.

Ainsi, le leadership pédagogique pourra être interprété comme un ensemble d’activités accomplies par la direction elle-même, ou déléguées à d’autres acteurs du milieu scolaire, visant la réussite des élèves.

Cependant, les directions doivent également avoir la capacité d’établir leur appréciation (et non une évaluation) de l’enseignement afin d’en discuter de manière constructive avec les différents intervenants, et surtout avec les enseignants, dans le but d’améliorer les apprentissages des élèves. En somme, le sens donné au leadership pédagogique de la direction d’école semble très large et représente assurément une responsabilité complexe. Le point de vue à cet égard est partagé selon les directions rencontrées ; parfois le leadership est partagé et participatif, parfois il constitue un engagement envers les actions menant à la réussite des élèves.

Le leadership pédagogique se traduit  à travers une collégialité pédagogique qui laisse place au professionnalisme de la direction d’établissement d’enseignement et des enseignants, lesquels participent au processus décisionnel en mettant à profit leur expertise liée à leurs compétences professionnelles. Bien que les compétences des directions aient été citées comme centrales dans le développement de leur leadership, celles-ci ne font actuellement pas partie d’aucune formation spécifique à court terme, même si elles sont requises dans l’implantation d’un changement majeur comme l’exercice du rôle de leader pédagogique.

Le souci d’atteindre les objectifs du projet d’établissement ainsi que la mise en place de nouvelles pratiques pédagogiques se traduisant dans des stratégies innovantes ont surtout permis à des directions de lycées marocains d’instaurer des moyens afin d’assurer leur leadership pédagogique, en considérant que la supervision pédagogique constituait un moyen efficace afin de prendre les meilleures décisions en lien avec la réussite des élèves. C’est pourquoi la supervision pédagogique s’est inscrite comme une fonction importante du suivi du projet d’établissement à l’interne de l’établissement d’enseignement.

Le rôle de superviseur pédagogique, en lien avec le leadership pédagogique, dépasse largement celui d’accompagnateur pédagogique. C’est un rôle qui permet d’utiliser différents modes de supervision afin d’assurer les meilleures conditions de réussite des élèves. On peut parler de visites de classes, de révision de méthodes d’enseignement, etc. Ce rôle est relativement nouveau pour les directions de collèges et de lycées au Maroc et nous notons qu’il y a certaines directions qui ne se sont pas encore totalement engagées dans ce processus de supervision. Cependant, la plupart assurent un contrôle sur l’ensemble des résultats des élèves afin de réduire les écarts en lien avec les résultats souhaités et de chercher des solutions adéquates aux problèmes rencontrés.

La majorité des directions rencontrées ont reconnu l’effet très positif du projet d’établissement sur la persévérance scolaire, sur l’amélioration des apprentissages des élèves et, notamment, sur le développement de nouvelles pratiques pédagogiques. Plusieurs ont situé le leader pédagogique au centre du projet d’établissement, car les directions visent le développement des jeunes tout en poursuivant les valeurs éducatives du pays. Elles ont aussi souligné la place importante de l’inspection pédagogique en complémentarité dans la réalisation du projet d’établissement et la réussite des élèves. Cependant, la situation évolutive vers des rôles émergents reste encore un élément clé d’amélioration du pilotage du projet d’établissement et demeure un aspect à délimiter au niveau des tâches et rôles pédagogiques entre la direction du collège ou du lycée et les inspecteurs pédagogiques.

Dans le cadre de cette étude, c’est par le partage de ces rôles que les directions d’établissement marocaines se sont représenté les situations réelles et ont ainsi interprété leur réalité tout en apportant un sens spécifique à leur vision globale du projet d’établissement. Les multiples interactions avec plusieurs acteurs sociaux ont démontré comment elles comprenaient leur milieu et pouvaient expliquer leur agir cohérent et pertinent. Le  tableau synthèse suivant  présente   les rôles mobilisés émergents chez certaines directions de collèges et de lycées marocains selon leurs représentations partagées. On peut déjà y noter la prédominance du rôle de leader pédagogique 

Tableau 3.1     Synthèse des rôles émergents partagés par les directions de collèges et  de lycées marocains

Dir.

Rôles

Agent de 
 changement

Accompagnateur pédagogique Leader pédagogique

Superviseur 
 pédagogique

D1 L

√ 

D2 L

 

 

D5 L

D6 L

 

D7 C

 

D9 L

 

 

D11 L

 

 

D12 L

 

 

D13 L

 

D15 L

 

D16 C

 

 

D19 L

√ 

D22 L

 

 

D23 L

D25 L

 

D26 C

 

 

D27 L

 

 

D28 C

 

 

D29 C

 

 

D30 L

 

 

D31 C

 

 

D32 L

 

D33 L

 

 

D34 C

 

 

D36 L

 

 

D38 L

 

Note. Légende : D + numéro = Direction et le numéro des 38 directions rencontrées ; C = Collège ; L = Lycée.

La gestion du projet d’établissement a contribué à préciser des tâches plus complexes pour les directions de collèges et de lycées marocains qui ne faisaient pas partie de leur fonction auparavant. Ces directions, engagées dans la réforme du système éducatif, ont adopté de nouveaux rôles exigeant souvent de l’innovation, de la créativité et de l’engagement de leur part. Le changement de type de gestion, qui a marqué une rupture avec le passé plus traditionnel du cadre de gestion des établissements d’enseignement, a fait émerger une connaissance récente des rôles exercés lors du pilotage du projet d’établissement, mais a aussi mis en évidence des rôles en lien avec la gestion pédagogique du projet d’établissement.

Un nouveau modèle de gestion s’est imposé par le pilotage du projet d’établissement et cette approche récente, dans un contexte éducatif marocain en évolution, a exigé de la part des directions de collèges et de lycées d’assurer différents rôles, comme nous l’avons présenté précédemment. De nouvelles dimensions en divergence avec leurs rôles traditionnels précédents ont suscité l’apport de rôles émergents qui ont eu un impact sur toute la gestion pédagogique du projet d’établissement dans certains établissements d’enseignement et plus précisément le rôle de leader pédagogique.

4. Discussion

Le projet d’établissement peut être à la fois source et conséquence d’un changement sociétal. Cette orientation vise à la fois à remédier aux difficultés rencontrées par l’établissement pour maintenir son équilibre interne sans remettre en cause le système tout en développant de nouvelles pratiques visant l’amélioration des apprentissages des élèves. De ce point de vue, le projet d’établissement et les exigences de sa démarche, à savoir l’engagement des acteurs, le travail d’équipe, l’implication de nouveaux partenaires, la participation à la décision, etc., introduisent un changement important dans la culture organisationnelle de l’établissement.

Le projet d’établissement est caractérisé à la fois par sa spécificité, les valeurs qu’il préconise, les objectifs à atteindre et les stratégies utilisées en lien avec ces derniers. Ces caractéristiques inhérentes à celui-ci sont décrites de façon générale dans les documents officiels du ministère de l’Éducation nationale du Maroc et plus précisément dans la Stratégie nationale du projet d’établissement. 

Nos données font ressortir cependant  une spécificité de tâches diverses  accomplies selon les établissements d’enseignement concernant les différentes étapes du pilotage du projet d’établissement. La démarche adoptée a nécessité un changement et même une transformation surtout dans la sphère pédagogique. Un nouveau modèle de gestion s’est imposé  et cette approche récente, dans un contexte éducatif marocain en évolution, a exigé de la part des directions de collèges et de lycées d’assurer différents rôles. De nouvelles dimensions en divergence avec leurs rôles traditionnels précédents ont suscité l’apport de rôles émergents qui ont eu un impact sur toute la gestion pédagogique du projet d’établissement dans certains établissements d’enseignement. Ces rôles n’étaient pas prédominants dans notre étude, mais néanmoins ils revêtaient une grande importance pour l’ensemble des directions de collèges et lycées dans la gestion pédagogique du projet d’établissement.

Ces rôles sont nouveaux dans le contexte actuel de l’établissement d’enseignement marocain et ne sont pas tous exercés également  par les directions de collèges et lycées, car ils sont étroitement associés à un changement pédagogique où les principaux acteurs ne les ont pas totalement intégrés  dans leur fonction de direction.

Procéder à un nouveau changement ciblant l’amélioration des apprentissages des élèves par la gestion efficace du projet d’établissement requiert un certain leadership, comme l’ont souligné précédemment plusieurs directions. Afin de motiver les différents acteurs impliqués dans une action pédagogique concertée, les directions ont reconnu qu’elles devaient posséder des qualités, des capacités et des compétences pour mener à bien le projet d’établissement, mais certaines sont allées plus loin en reconnaissant qu’elles devaient intervenir auprès des enseignants afin d’améliorer les pratiques éducatives et qu’à ce titre, elles pouvaient exercer un leadership pédagogique. Voici un témoignage d’une direction de lycée sur le sujet :

Un leader pédagogique, c’est vrai, il doit avoir une action sur la réussite des élèves. Je le considère comme un catalyseur qui provoque un travail qui est rapide et utile. Comme moi par exemple, je n’ai pas une idée sur toutes les matières, mais je peux avoir une idée sur la matière en général. Je dois [amener] ces enseignants à mieux enseigner en communiquant avec eux pour déterminer leurs besoins, pour déterminer comment améliorer l’enseignement de cette matière en partant des besoins et en regardant ce qu’on a comme matériel, comme points forts, comme points faibles dans l’établissement. (Directeur de lycée)

Ce type de leadership spécifiquement appliqué dans des établissements d’enseignement reste encore un concept qui peut manquer de clarté ou est sujet à une subjectivité liée à la représentation que peut se faire chaque direction. 

Dans notre recherche, le concept de leadership pédagogique n’est pas encore suffisamment bien conceptualisé par les acteurs concernés et constitue un nouveau rôle en émergence et en développement. Nous observons que certaines directions de lycées démontrent des capacités à mobiliser ce rôle le trouvant essentiel dans la gestion pédagogique du projet d’établissement. Cependant les données recueillies tendent à montrer selon leur perception que la plupart des directions ne disposent pas de toutes les compétences requises pour faire face à ce processus de changement et cela se traduit dans la représentation de leur rôle de leader pédagogique.   Une rupture presque totale avec leurs pratiques habituelles amène quelquefois des tâtonnements et des hésitations à adopter de nouveaux rôles. À cette limite plus personnelle, s’ajoute aussi celle reliée à l’autorité dont disposent les directions étant dans une posture parfois inconfortable avec les rôles exercés par les inspecteurs responsables de l’évaluation pédagogique dans la classe.

Dans notre étude, plusieurs directions en sont encore aux balbutiements du développement de leur leadership pédagogique, certaines d’entre elles faisaient surtout de l’accompagnement pédagogique, ce qui ne nécessite pas de choix pédagogiques précis à mettre en œuvre. Tout en reconnaissant l’importance d’exercer ce rôle, plusieurs obstacles les empêchent de l’assumer dans sa plénitude. Notons ceux dont elles nous ont parlés, à savoir leur statut dans l’établissement d’enseignement, leur expertise liée à tous les aspects pédagogiques, les exigences administratives de leur supérieur, sans compter les défis inhérents aux nouvelles tâches plus complexes dans le cadre de la réforme, etc.

 Pour assurer ce rôle central dans la gestion du projet d’établissement, les directions doivent démontrer des compétences reliées à la gestion pédagogique et ces compétences ne sont pas encore totalement développées chez les directions rencontrées. Il faut aussi reconnaître que toute crédibilité de la direction est souvent reliée au poste qu’elle occupe. Actuellement, elles sont des enseignants principaux et selon les politiques en place, le MEN n’a pas encore reconnu officiellement un statut différent aux directions de collèges et lycées, ce qui les place dans une situation parfois inconfortable face aux enseignants.

Le leadership pédagogique se traduit parfois à travers une collégialité pédagogique qui laisse place au professionnalisme de la direction d’établissement d’enseignement et des enseignants, lesquels participent au processus décisionnel en mettant à profit leur expertise liée à leurs compétences professionnelles. Cependant, dans le cadre de notre recherche, bien que les compétences des directions aient été citées comme centrales dans le développement de leur leadership, actuellement, celles-ci ne font pas partie d’aucune formation spécifique à court terme, même si elles sont requises dans l’implantation d’un changement majeur comme celui de l’exercice du rôle de leader pédagogique. 

Pour exercer le rôle de leader pédagogique et conduire un processus de changement qui implique de manière pérenne la participation de tous les acteurs concernés dans la communauté éducative, il faut s’assurer du développement des capacités et des compétences des directions concernées, mais aussi de leur pouvoir d’agir afin d’améliorer la qualité de l’enseignement dans la classe. Ce rôle de composition et de chef d’orchestre favorise l’harmonisation des pratiques professionnelles et pédagogiques.

La direction, en tant que leader pédagogique, doit avoir une bonne expertise de l’ensemble du curriculum, afin d’assurer une appréciation de l’enseignement donné et de pouvoir en discuter pour assurer une bonne régulation dans le projet d’établissement. Plusieurs directions ont indiqué que cet aspect pouvait parfois leur poser problème, car elles ne considèrent pas maîtriser toutes les connaissances curriculaires. Le développement de ces connaissances et des connaissances pédagogiques exige l’engagement de la direction dans son propre développement professionnel, mais aussi dans celui des enseignants. Les directions de collèges et lycées doivent maîtriser ces éléments clés du projet d’établissement afin d’en faire un suivi efficace. Cependant, dans la situation actuelle, il est à noter que ce dernier aspect, relève plus des inspecteurs et vient confronter l’exercice du rôle de leader pédagogique.

Remarquons que  le processus relié à une supervision pédagogique favorisant des échanges multiples et des questionnements pertinents, et la compréhension de processus méthodologiques et pédagogiques font partie, pour quelques directions de lycées, des atouts nécessaires à l’exercice de leur leadership pédagogique. Le leadership pédagogique des directions de collèges et de lycées marocains est donc une pièce centrale du processus de transformation des établissements concernés dans la visée d’une meilleure réussite des élèves et l’amélioration de la qualité de l’enseignement passera précisément par la mise en place d’une supervision pédagogique assurée par la direction afin d’apporter une meilleure cohérence dans les pratiques pédagogiques.

Nos résultats ne présentent pas l’exercice du rôle de leader pédagogique dans toutes ses dimensions et surtout en ce qui concerne l’instauration d’une supervision pédagogique officielle en lien avec les résultats désirés dans le projet d’établissement. Il reste à préciser la délimitation entre le rôle pédagogique exercé par la direction de collège et lycée au regard du projet d’établissement et celui de l’inspecteur si on veut s’assurer à la fois de l’exercice du rôle de leader pédagogique et d’une bonne supervision pédagogique.

Le rôle de leader pédagogique reste un rôle en émergence, car il est peu ou pas représenté chez plusieurs directions de collège et lycée marocains, les directions de collèges et lycées faisant surtout de l’accompagnement pédagogique, Cependant, ils reconnaissent que le pilotage du projet d’établissement requiert des rôles reliés à la gestion pédagogique, mais que ce processus est évolutif et dépendra de plusieurs conditions pour la direction de collèges et lycées. Nos résultats mettent en lumière que les directions de collèges et lycées, malgré les obstacles présents, sont engagés dans un processus de mobilisation de tous les rôles requis dans le pilotage du projet d’établissement

5. Conclusion

Le projet d’établissement constitue un concept clé et  est un moteur de l’innovation pédagogique dans les établissements où il est mis en œuvre. Il devient un levier de  l’amélioration des apprentissages des élèves  qui constitue un grand défi pour les organisations scolaires.

Les représentations sociales des rôles mobilisés par les directions de collèges et lycées marocains ont contribué à mieux cerner l’approche choisie pour mener à bien le projet d’établissement et de constater comment les directions rencontrées se représentaient leurs rôles lors du pilotage du projet d’établissement. Ainsi il a été mis en évidence que le statut officiel des directions non reconnu comme autorité légale leur attribuant des pouvoirs et des responsabilités définies dans la gestion de leur établissement, un manque de marge de manœuvre et aussi le peu de formation en gestion ont été des facteurs qui ont limité l’action de certains rôles. Les rôles émergents d’agent de changement, de leader pédagogique et de superviseur pédagogique sont apparus comme des rôles secondaires dans notre étude, étant exercés et mobilisés par une minorité de direction, surtout des directions de lycées. Malgré cette observation, nous constatons que ces rôles sont centraux dans une gestion pédagogique du projet d’établissement. Leur représentation a aussi varié d’une direction à une autre tout dépendant de l’expérience des directions, des stratégies qu’elles ont choisies, mais aussi des compétences déterminantes en lien avec la gestion pédagogique du projet d’établissement, ces dernières étant en général peu développées. En ce sens, les compétences requises pour intervenir dans des situations de plus en plus complexes et l’impact des décisions en lien avec la gestion pédagogique des directions selon leur degré d’appropriation peuvent être en cause dans la représentation qu’elles nous ont partagées.

Des conditions reliées au ministère de l’éducation, à la direction, à l’établissement d’enseignement devront être présentes dans le contexte souhaité afin de réaliser le projet d’établissement jusque dans la classe en assurant ainsi une coordination à tous les paliers, mais un engagement majeur de la part des autorités envers les établissements d’enseignement précisément envers la direction qui est responsable de toute la gestion du projet d’établissement. Ceci constituerait un appui incontestable dans le processus de réussite chez les élèves des collèges et lycées marocains. La gestion du projet d’établissement représente en soi un facteur de régulation des pratiques pédagogiques qui peuvent assurer une amélioration des apprentissages des élèves. 

Accroître l’impact positif du projet d’établissement passe par plusieurs étapes. La première concerne la formation continue adéquate des directions en poste, formation qui viendrait renforcer leurs capacités et leurs compétences dans la gestion du projet d’établissement, dans la gestion des ressources humaines, financières, pédagogiques, dans l’exercice de leurs rôles, notamment celui de leader pédagogique et de superviseur pédagogique, etc. Elle passe aussi par la formation de tous les intervenants dans le projet d’établissement, notamment les enseignants et les inspecteurs. Le bon pilotage du projet d’établissement pourra se faire notamment sous l’égide d’une direction compétente qui maîtrise toutes les étapes de la gestion de celui-ci. Une formation initiale est aussi nécessaire pour les nouvelles directions, car comme celles en poste, elles sont perçues comme des leviers premiers, des agents capables d’influencer les conditions locales d’enseignement et d’apprentissage qui favorisent une détermination et une représentation plus précise des rôles exercés

La deuxième étape concerne le statut de la direction. Afin de reconnaître la direction comme pierre angulaire d’une bonne gouvernance et d’une gestion efficace du projet d’établissement, le poste de direction doit se distinguer de celui d’un enseignant, il doit être mieux défini en tant que rôles à exercer, responsabilités et compétences requises. Mieux préciser les rôles de chacun c’est aussi s’assurer des compétences de base pour les exercer. C’est aussi reconnaître les compétences essentielles des directions au regard de la mise en œuvre du projet d’établissement ou celles-ci peuvent intervenir afin d’améliorer la réussite des élèves de son établissement. Pour le MEN, les directions sont le pivot central d’une réalisation du projet d’établissement et leurs rôles dans la sphère pédagogique se doivent d’être distingués clairement. 

D’autre part, la gestion du projet d’établissement ne pourra pas se déployer efficacement sans une précision des rôles pédagogiques dédiés aux directions d’établissement d’enseignement et aux inspecteurs qui interviennent dans ces milieux. Nous n’avons pas étudié les conflits de rôles et les situations d’ambiguïté dans l’exercice des rôles, cependant, cet aspect nous est apparu comme un élément essentiel à envisager pour une gestion plus efficace du projet d’établissement et un engagement de tous les acteurs concernés. Délimiter de façon précise les rôles de chacun pourra concourir certainement à une meilleure gestion pédagogique du projet. Une bonne conduite du changement requiert l’appropriation de l’esprit du changement, de la volonté d’innover et de la méthode dans l’action et la gestion à toutes les échelles et dans diverses composantes de l’établissement d’enseignement.

Une bonne conduite du changement repose sur de hautes compétences humaines au niveau de la gestion, de la communication et de la mise en œuvre des mesures appropriées. Ces compétences doivent pouvoir rendre compte régulièrement des réalisations de la réforme et évaluer ses résultats. Parmi les qualités requises des responsables de la conduite du changement, figure leur capacité d’impliquer régulièrement tous les acteurs, au sein des établissements et pour le MEN au niveau régional et national. L’ensemble de ces mesures combinées aidera à réunir les conditions de réussite de la conduite du changement et de la réalisation de la réforme escomptée. Un leadership pédagogique  stimulant et des capacités de gestion efficientes et efficaces dans la gestion du projet d’établissement vont concourir à une meilleure réussite des élèves marocains. Plusieurs concepts restent encore à être étudiés dans le contexte de réforme au Maroc et plus précisément en ce concerne les directions d’établissement d’enseignement dans un processus évolutif des mesures mises en place, dans le déploiement de la délégation de pouvoir en lien avec les divers niveaux de responsabilités et de la marge de manœuvre attribuée à cette dernière, etc.  Les directions d’établissement d’enseignement marocaines restent un sujet de recherche très actuel dont plusieurs aspects n’ont pas tous été étudiés dans le cadre de la réforme implanté au Maroc.

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